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contre le décrochage scolaire

Le décrochage scolaire est un grand fléau, autant par son étendue, que par ses innombrables impacts sur la vie des jeunes décrocheurs, de leur famille actuelle et futureainsi que sur la communauté. Dans les pays riches comme le Canada, un niveau d’études minimal est non seulement obligatoire, mais également considéré primordial pour qu’un individu puisse contribuer à son pays. D’ailleurs, il est possible de constater que le style d’enseignement de nos institutions ne parvient plus à suivre le rythme des changements drastiques de la société, et ce, depuis quelques années.  

Un récent sondage effectué auprès de centaines de décrocheurs a mis en lumière que, les trois quarts des jeunes interrogés (75%) disent qu’ils s’ennuyaient à l’école. Vous avez d’ailleurs probablement déjà entendu ce type de commentaires durant un souper, venant d’un jeune membre de votre famille, comme un petit frère, un neveu ou une cousine.  Vous l’avez peut-être même déjà dit vous-même.  

Le problème du décrochage scolaire est plus important que ce que l’on pense. À Montréal, un jeune sur six (15, 9 %) décroche avant d’avoir obtenu un premier diplômeselon une récente étude du Réseau Réussite Montréal. Dans cette même étude, la chambre de commerce du Montréal métropolitain calcule que, le décrochage scolaire prive l’économie montréalaise de 593 millions $. En Estrie, c’est plutôt un taux de décrochage scolaire de 17,3 %. 

Un mentor de Robotique Udes, Alex Morin, qui aide un jeune dans une construction de catapulte en Lego

Le contexte

Robotique UdeS est un groupe d’étudiant(e)s bénévoles de la faculté de génie de l’Université de Sherbrooke qui vise à pallier les manques de ressources qui empêchent l’implantation d’un outil de lutte contre le décrochage scolaire qui se rapproche du génie ; la robotique. Ainsi, Robotique Udes ne réinvente pas la roue, mais est plutôt le catalyseur qui permet de démocratiser la robotique auprès des écoles de la région de l’Estrie. En bref, Robotique Udes vient faire des activités de robotique Lego dans les écoles primaires et secondaires.

Notre problématique

Une mentore de Robotique Udes, Daphné Normandeau-Guimond, qui aide à la construction d’un robot Lego.

Notre expérience dans le milieu nous a permis de comprendre que les enseignant(e)s ont généralement trois problèmes pour intégrer des activités de robotique dans leur classe. Premièrement, ils manquent de financement, puisque qu’il faut investir environ 2000 $ par classe pour s’équiper en matériel de robotique. Ensuite, les enseignant(e)s manquent souvent de connaissances avec le matériel pour être à l’aise de bien expliquer son fonctionnement aux jeunes. Finalement, il est difficile d’intégrer la robotique aux demandes d’apprentissages déjà chargées du ministère de l’éducation.

Nos solutions

Robotique UdeS tente de résoudre ces problèmes en aidant financièrement des classes en démarrage chaque année. En effet, plusieurs milliers de dollars ont été distribués à des classes de la région de Sherbrooke. Heureusement, depuis l’année scolaire 2019, le ministère de l’éducation a débloqué pratiquement 15 000 $ par école pour que ces dernières s’équipent en matériel robotique. Robotique UdeS a alors travaillé avec la commission scolaire de l’Estrie pour recommander les bonnes pratiques en lien avec ce matériel spécialisé.

Ensuite, Robotique UdeS a construit, depuis plusieurs années, un programme de recrutement et de formation de mentors provenant de la faculté de Génie de l’Université de Sherbrooke pour que ceux-ci soient disponibles pour les classes d’écoles primaires de l’Estrie. Les mentors se regroupent en équipe de deux ou trois et ces derniers sont mis en relation avec un(e) enseignant(e) qui en a fait la demande. Les écoles dans les milieux plus défavorisés sont mises en priorité, puisque plusieurs études montrent que le décrochage scolaire est plus grand dans ces milieux. Nos mentors vont complètement prendre le contrôle de la classe pendant une période allouée, afin de donner des défis de robotique stimulants qui suivent la formation que nous avons construite.

Finalement, il nous reste encore du chemin à faire pour intégrer la robotique aux demandes d’apprentissages du ministère de l’éducation. Actuellement, des défis de style « exposition scientifique », tirés d’organisations de robotique pédagogique comme FIRST avec leur programme FLL ou Zone 01, sont utilisés. Ce format permet non seulement aux jeunes d’étudier un sujet, mais aussi de pouvoir l’imaginer, le construire et l’animer en utilisant les Lego et la programmation. Par contre, cette solution demande beaucoup de temps de la part de l’enseignant(e). De ce fait, nous sommes en communication avec la commission scolaire de l’Estrie pour mettre sur pieds un cahier qui permettra de guider, mais également de suivre la progression des jeunes. Nous pensons que même si ce défi est encore à surmonter, beaucoup de progrès a été fait pour inculquer un apprentissage qui est plus adapté à la nouvelle génération.

Les apprentissages cachés sous la robotique

Des jeunes du primaire qui font un remue-méninge sur un problème de robotique

Le style d’enseignement de la robotique demande un plus grand degré de liberté que d’autres types d’enseignements. Cela permet de transposer concrètement des compétences qui sont très utiles pour les nouvelles générations.

La visualisation et la communication d’idées

Les Lego, en général, demandent à l’utilisateur de visualiser ce qu’il veut construire avant même de commencer l’assemblage des bons morceaux entre eux. Cela est encore plus vrai avec la robotique pédagogique, puisque la dimension de la programmation est ajoutée à l’utilisation des Lego. Dans nos défis, les jeunes doivent travailler ensemble pour trouver une solution pour que l’équipe de programmation (généralement deux jeunes) et l’équipe de conception (généralement deux autres jeunes) puissent comprendre et visualiser. Il arrive souvent qu’un mentor demande à un groupe de jeunes : « Comment voulez-vous construire votre robot ? », alors qu’aucun dessin n’a été préalablement fait pour assurer la bonne continuité des idées.  À force, cela permet de pratiquer les jeunes à prendre l’habitude de faire un design de leur conception avant tout.  D’ailleurs, cette nouvelle approche permet, pour certains jeunes, de faire le pont entre plusieurs matières.

Le travail d’équipe est l’aspect le plus important pour toute résolution de problème en ingénierie, comme c’est le cas avec les défis de robotique pédagogique. Les jeunes apprennent déjà à travailler en équipe dans d’autres projets en classe, mais le travail d’équipe ici demande des compétences interpersonnelles plus aiguisées, puisque les jeunes doivent se mettre dans la tête de leurs collègues quand ils expliquent leur idée. Cela met de l’avant l’importance d’être attentif à chaque idée, puisque celle qui semble la plus banale peut en réalité s’avérer être une idée de génie pour une autre personne. Les jeunes constatent vraiment la force d’une équipe dans ce genre de situation.

Être à l’aise avec l’inconnu

Les défis d’ingénierie comme FLL demandent d’être à l’aise avec le fait de ne pas tout comprendre. Les jeunes apprennent comment savoir ce qu’ils ne savent pas et comment se débrouiller pour en apprendre davantage avec ce qu’ils connaissent déjà ou en osant tout simplement demander de l’aide. L’apprentissage est donc actif. Cette approche est souvent déstabilisante et enrichissante pour les jeunes qui sont habituées à une forme d’apprentissages plus passive.

Des jeunes en compétition FLL
La créativité

Il va de soi que la créativité est une compétence clé pour réussir au 21ième siècle. Quoi de mieux pour acquérir davantage de créativité que de donner à un jeune les outils lui permettant de construire et programmer pratiquement n’importe quoi. Quand nos mentors vont en classe, ils ne vont pas donner un défi avec un plan et une solution à suivre. Ils font plutôt le contraire, puisqu’ils donnent trois formations de bases qui permettent d’outiller les jeunes, lesquels vont parvenir à développer leurs habiletés réelles par la pratique.

La première formation vise à expliquer ce qu’est un robot et de quelle façon il faut lui donner différentes commandes et instructions. La deuxième est sur l’explication des différentes composantes mécaniques possibles, telles que les poulies, moteurs, engrenages, élastiques, etc. Finalement, les mentors donnent également une formation sur la programmation du robot. Les jeunes apprennent alors comment déplacer le robot, comment utiliser des capteurs, mais également, comment penser comme un programmeur.

Par ce processus, j’ai vu des jeunes construire des tanks opérationnels pour passer par-dessus des obstacles. D’autres jeunes ont plutôt construit un système de freins arrière pour gagner dans des compétitions de sumo. Dans un autre cas, des jeunes ont construit un système d’engrenages qui donnait l’impression de pédaler un vélo. Ainsi, il est fascinant de constater à quel point un élève du primaire peut être beaucoup plus créatif que nous lorsqu’on lui en laisse la liberté.

Quelles sont les prochaines étapes?

Pendant les quatre ans de l’initiative de mentorat de Robotique Udes, beaucoup de choses ont changé et beaucoup de progrès a été réalisé au niveau du ministère afin de mettre de l’avant ce genre d’initiatives. Toutefois, beaucoup de travail reste à faire pour jumeler les efforts aux apprentissages obligatoires du ministère, lesquels sont déjà très demandants en termes de temps. Robotique Udes croit sincèrement que d’offrir un modèle universitaire de plus aux jeunes dans les classes du primaire, sous la forme du mentorat qui permet la réalisation de la robotique pédagogique, est la solution. La plupart des jeunes, dont ceux des milieux plus défavorisés, n’auront plus uniquement comme modèle universitaire leur enseignant(e).

Les prochaines étapes seront d’étendre l’initiative dans plus de milieux, comme à Montréal, là où Poly Star a été créé avec le même modèle que Robotique Udes. Un partenariat entre les universités des différentes régions et les écoles de ces mêmes régions est ainsi primordial pour réduire de façon considérable le décrochage scolaire.

Nous aimerions remercier tous nos commanditaires, sans qui nos activités ne seraient pas possibles. Nous vous en sommes très reconnaissants. Merci de nous permettre de réaliser des projets concrets, d’avoir un impact sur la communauté, et de nous épanouir tout en nous développant personnellement et professionnellement. 

Un merci tout particulier à Merkur grâce à qui nous pouvons redonner davantage a la communauté.